B. CONSEQUENCES DE LA COLONISATION Extrait de De la lutte pour la libération du peuple Lulua de Mukenge Shabantu |
2. L'administration coloniale
L'autorité coloniale procéda au déplacement forcé des Lulua qui habitaient les sites où elle s'était établie afin de mieux asseoir sa domination au détriment des natifs! La preuve en est le cas de la ville de Kananga. Elle est le produit des déplacements forcés des Lulua de leurs antiques emplacements en vue d'aménager les sites où ont été installés les Baluba. Avant l'arrivée des Blancs, l'occupation de l'espace était la suivante:
- Les Bena Mukadi habitaient Mikomo et Tshifuma , qui devinrent des villages des Bena Nsapo. Nkongolo Moshi ( Nkongolo 1er avec les Bena Kankonde) habitait à l'emplacement actuel de la paroisse Saint Thomas à Kanyuka. Donc ce dernier remplaça Nkongolo Moshi, les Bena Mukangala habitaient la mission Ntambwe et l'actuelle commune de la Nganza. Ils furent remplacés par Tshimbi et Luamba wa Bena Muya ; Dikola, capita de Ndaye Nkufulu et Mupanda wa Bena Meta habitaient à l'emplacement de l'hôpital Bon Berger, près de la Lulua (Chute Katende 1) et l'emplacement où se trouvait le secteur baluba, actuellement Station Terrienne de Nkonko. Ils furent remplacés par Kalala Matu, Kazadi Mfuamba vers 1925-1930 et Tshikaji wa Bena Kabombo.
Tshingesha qui occupait le site de l'actuelle commune de Lukonga, fut remplacé par les Bena Mulombo de Biosha et Ntambwe Kankonde.
- Les Bena Mande habitaient Baseke et Kanyuka Kasasa actuel. Bakwa Mushilu se trouvaient à Kamfuele actuellement Katole. Bena Kasase (une partie de Bakwa Ndaye) habitaient l'actuelle Kananga II jusqu'au Camp Militaire EFO.
- Les Bena Kashiye occupaient le centre et l'ouest de l'actuelle commune de Kananga avant de se déplacer de leur propre volonté pour Kempe et avant le déplacement forcé des autres qui suivirent leur départ quelques années après.
- Les Bakwa Ndaye habitaient l'actuel emplacement des villages Mupompa, Lembalemba, Tshimbawo, Katenga, Kayaya Nsampi, Mbwanya jusqu'à Kamwandu avant de descendre à leur emplacement actuel à l'ouest de Kapalula jusqu'à la Lulua et au-delà de la Lulua (l'actuelle mission de Kabwe s'étendait jusqu'à la Lubi en plein quartier Lubiampata).
Dans le temps, «Kalamba Tunsele wa Ilunga» habitait, avec ses hommes de la rivière Nganza au Centre de l'Hygiène en passant par la résidence du Gouverneur, le bâtiment administratif, Immokasaï et l'actuel quartier Malandji. La tombe de ce grand Chef TUNSELE WA ILUNGA, se trouve dans le lit de la rivière KELE-KELE. Son successeur, MUKENGE MATADI quitta, exceptionnellement, de son propre chef cet emplacement pour aller habiter KEMPE, en zone de Kazumba. C'est à cet endroit que fut construite la première zone de santé de l'Etat Indépendant du Congo à Matamba (en1930). Quant aux bâtiments administratifs de la collectivité de Matamba, ils ont été construits à l'emplacement où se dressait la résidence du successeur de MUKENGE MATADI et KALAMBA TSHISUNGU.
Il y a aussi l'actuel quartier Tshilumba en zone de Katoka. C'était le domaine de Tshitebua wa Bena Mande et de Shatshikumba. Ils durent l'abandonner au profit de Mubiayi de Bakua Mulumba.
Seuls les Bena Kashiye avaient pu se déplacer librement de Kananga à la rive gauche de la Lulua.
Le Père Van Keerberghen mentionne dans son ouvrage ces faits de déplacement de populations :
«Les Bena Mukuna, les Bakwa Tshishimbula de Tshinkenke, les Bena
Kayembe de Shimatu et les Bakwa Lule de Santu a Kapongo, tous allèrent se fixer près de la rivière Tshibungu et de la Muanzangoma. Les Bakwa Mwanza traversèrent la Lulua aux environs de la Mission B UNKONDE. Les Bakwa Katawa qui habitaient près de Bakwa Mushilu (la population la plus ancienne de la région autour de Kananga et probablement d'origine locale, traversèrent la Lulua près de l'actuelle ville de Kananga.»
Ce qui nous peine, c'est le fait que ces déplacements au lieu de favoriser l'épanouissement des Lulua, occasionnèrent un profond déséquilibre et freinèrent leurs progrès. Car ces déplacements ne visaient pas leurs intérêts, mais ceux de l'autorité coloniale et parallèlement ceux des Baluba. Nous tenons à relever que tout cela se passait sans que l'Administration coloniale donne l'impression d'avoir bénéficié avant son installation et d'asseoir son autorité, du soutien inestimable de celui dont elle était alors l'hôte : le Roi des Bashilange, Kalamba Mukenge. Nous avons exprimé plus haut nos inquiétudes sur la manière dont, dans l'intérêt de la colonisation, certains historiens de l'époque en cause ont eu à embellir certains faits pénibles. Ce qui est encore plus pénible est qu'au-delà de son souci de servir les Baluba, il y a cet esprit de vengeance que le Blanc a voulu manifester en vue de mâter les Lulua qui avaient osé faire valoir leurs droits. Ces colonisateurs n'ont pas pardonné aux Lulua de leur avoir tenu tète lors des guerres qui les opposèrent et dont nous avons déjà parlé.